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Courrier du CAC au ministère

Paris le 6 juin 2016
Madame PINVILLE
Secrétaire d’État chargée du Commerce, de l'Artisanat, de la Consommation et de l'Economie sociale et solidaire, auprès du ministre de l'Économie, de l'Industrie et du Numérique
139, rue de BERCY 75012 PARIS

Madame la Ministre,
Le 15 mars 2016 vous annonciez le lancement par le gouvernement du premier appel à projet d’une durée d’un an pour des « contrats à impact social », variante « française » des « social impact bonds » du G8.
Le Collectif des associations citoyennes, Avenir Educs et leurs partenaires ont pris le temps d’analyser le texte de l’appel à projet ainsi que les premières opérations susceptibles d’être financées par des « contrats à impact social » présentées lors de la conférence de presse du 15 mars par l’Institut de l’entreprise et le Mouves. Vous trouverez ci-joint la brochure contenant ces analyses.
Nous y faisons plusieurs observations importantes quant aux principes des « contrats à impact social » :
1) La notion d’impact social n’est nulle part définie clairement, ni dans l’appel à projet ni dans le rapport sur « L’investissement à impact social » remis le 25 septembre 2014 à Madame Carole DELGA (alors secrétaire d’Etat chargée de l’Economie sociale et solidaire), ni dans les projets proposés le 15 mars. En revanche l’impact financier, à la fois en terme de coûts pour la collectivité publique et de profits pour les financeurs et les intermédiaires apparait lui nettement dans les analyses des expériences étrangères qui servent de modèle au projet du gouvernement.
2) Le premier argument mis en avant pour promouvoir les SIB, repose sur le l’idée qu’en période de pénurie d’argent public, faire appel à des financements privés dans le domaine social serait une solution innovante. Les Contrats à impact social ressemblant comme deux gouttes d’eau aux partenariats publics privés dont le Sénat dans un rapport du 16 juillet 2014, a souligné les dérives, « l’innovation » en question ne nous parait ni opportune ni innovante. Dans les conditions actuelles innover serait plutôt lutter effectivement, tant au niveau national que de l’Union européenne, contre les évasions et optimisations fiscales de toute nature, ce qui renflouerait les finances publiques et permettrait sans difficulté à l’Etat social de faire face à ses responsabilités.
3) Contrairement à ce qui est affirmé par les promoteurs des Contrats à impact social, en dernière analyse, c’est bien la puissance publique et non les investisseurs qui supportent les risques, à la fois le risque financier et le « risque social » pour reprendre les expressions en miroir de l’appel à projet.

Pour toutes ces raisons et quelques autres que vous trouverez dans la brochure jointe, s’aventurer vers des « contrats à impact social » nous apparait comme une fuite en avant engagée sous la pression de lobbies qui y voient là un intérêt surtout financier immédiat à réaliser.

Par ailleurs, nous tenons à rappeler que le Haut Conseil à la Vie Associative (HCVA) -dans son rapport du 2 mars 2016- et l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE) -dans son document du 15 avril 2015- ont eux aussi émis des avis très réservés sur ce dispositif.

Dans ce contexte, nous sollicitons votre disposition pour une rencontre au cours de laquelle nous pourrions aborder plus en détail ces questions.
Collectif des associations citoyennes,
Jean-Claude BOUAL, président